Le bonheur d’être soi

Une affiche placardée sur les grilles de l’Institut national du sport et de la performance (INSEP), dans le Bois de Vincennes

Il y a une chose que je perçois profondément quand je fais du théâtre, que je randonne ou que je dessine, c’est l’immense plaisir qu’on a à être soi ; et surtout, que ce plaisir consiste très précisément à aller jusqu’au bout de soi-même, à faire tout ce que l’on peut.

Il ne s’agit pas seulement de suivre ses vrais penchants, d’assumer ses goûts et de faire ce qui nous plaît ; mais de comprendre que tant que le point maximal n’a pas été atteint, tant que tout n’a pas été donné, on est non seulement dans l’inachèvement mais dans l’inauthenticité.

Il n’y a d’authenticité, de vraie fidélité à soi-même que dans l’aboutissement, dans la pleine et totale réalisation de nos potentialités, dans l’effort mené jusqu’à son terme.

Le sport, où l’effort se mesure aux mètres et secondes gagnées sur soi-même, est l’exemple le plus évident de cette course dont le seul vrai objectif est de nous permettre d’être enfin ce que nous sommes. Le bonheur de ceux qui achèvent une épreuve est dans l’épuisement, qui marque l’emploi de toutes les capacités, l’impossibilité d’aller plus loin, le don total et orgasmique qui a été fait de soi. Enfin, nous avons été à hauteur de nous-mêmes ! Enfin, nous nous sommes révélés !

Ce processus de révélation existe dans tous les domaines. Il est dans la perfection du geste, la trouvaille du mot, le rythme du pas, la rigueur du raisonnement, l’attention prêtée, la tendresse accordée, l’élégance de la variation, la qualité du soin. Tout s’y prête, à condition de mener l’effort jusqu’à son terme, de ne pas se laisser distraire ou engourdir par la paresse, le confort, la facilité et le bruit incessant du monde.

Je crois avoir passé une bonne partie de ma vie à ne pas comprendre cela et à être resté économe de mes forces, de mes passions, de mes amours, de mes talents et de mes dégoûts. Il faut parfois longtemps, très longtemps, pour réaliser que la tranquillité à laquelle on aspirait, à laquelle on avait travaillé et qui nous suffisait, était en fait un gâchis, le prélude d’un infini regret.

C’est un des rôles importants de l’école, une des missions de celles et de ceux qui nous aiment, que de nous apprendre cela : le bonheur qu’il y a à suivre la route de la persévérance, de la performance, de l’effort sur soi-même ; et le piège que dressent sur ce chemin les distractions, le désir de confort, les lauriers reçus.

Quant aux regrets, c’est la vie seule qui peut nous les apprendre.

Aldor Écrit par :

3 Comments

  1. 26 novembre 2022
    Reply

    Cher Monsieur,
    Ne pouvant pas vous ecrire via Linkedin, je vous contacte directement sur votre blog pour vous dire à quel point je suis impressionné par la grande pertinence, et la qualité de vos ecrits!
    C’est avec le plus grand plaisir que je viens de diffuser deux de vos écrits sur mon mur Linkedin!
    Je vous souhaite un agréable week-end.
    Bien cordialement,
    Sergyl Lafont.

    • Aldor
      27 novembre 2022
      Reply

      Merci beaucoup !

  2. […] lorsque ces mouvements émanent de nous-mêmes, de notre propre désir, qu’ils tendent au bonheur d’être soi ; mais le refus de cette propension à avoir plus, à gagner plus, à être plus fort que les […]

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